Quelle place pour la communication dans une gestion de crise?
- La direction
- il y a 18 heures
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La communication n’est pas un gadget qui peut ponctuellement rendre quelques services dans la gestion d’une crise. Ce n’est pas non plus la solution miracle qui va régler toutes les difficultés rencontrées. C’est résolument un outil opérationnel, comme d’autres, qui va contribuer à résoudre la crise. Pour cela, la communication doit être mise en œuvre avec une posture proactive et donc ne pas être perçue comme un outil réactif.

« La com, vous me préparez un communiqué de presse et un ''Tweet''… »
Trop souvent, cette phrase résume les directives données à la cellule communication lors d’un briefing (breffage) de gestion de crise.
Elle illustre parfaitement le rôle limité et réactif que l’on alloue à la fonction communication dans la conduite d’un plan de continuité des affaires. Cette position conduit inexorablement les actions communicationnelles dans une logique « outil » et en limite grandement l’efficacité.
Si cette option est choisie, c’est que, bien souvent, les acteurs de la gestion de crise se focalisent sur le court terme et la gestion de l’urgence.
Or la communication est une fonction opérationnelle puissante pour peu qu’elle soit utilisée à bon escient. Mais pour cela, la cellule communication doit impérativement adopter une position proactive.
Cela signifie qu’il est indispensable pour le communicant de réfléchir avec une vision stratégique de la situation. À l’instar de la citation de Clausewitz, il s’agit de « ne pas faire un pas sans réfléchir au dernier ».
Concrètement, la cellule communication va concevoir ses actions dans le seul but d’atteindre des objectifs et non d’activer des outils.
Prenons à titre d’exemple concret la gestion d’un incendie sur un site industriel de fabrication de produits chimiques.
L’intégrité physique des habitants n’étant plus assurée, le directeur des opérations décide de faire évacuer la population dans une zone géographique définie.
La cellule communication peut alors se contenter d’un « Tweet » informatif et d’un communiqué de presse et espérer que le plus grand nombre d’habitants concernés soit informé.
Elle peut aussi prendre le temps nécessaire pour analyser la situation. Quelle est la typologie sociologique et géographique de la zone concernée?
Transmettre une alerte d’évacuation n’a pas les mêmes répercussions dans une zone urbaine que dans une zone rurale ou que dans une zone industrielle.
Quelles vont être les conséquences de la diffusion de l’alerte? Diffuser une alerte dans une zone à forte densité d’habitants risque de provoquer rapidement une saturation des axes routiers.
À l’instar de ce qui est fait pour une opération de communication classique, cette analyse va permettre au chef de la cellule communication d’élaborer un ou des objectifs pour appuyer l’action des équipes opérationnelles lors de l’évacuation.
Cette analyse se poursuivra par l’identification des parties prenantes concernées par cet objectif, la détermination des actions à mettre en œuvre et la planification.
Ce n’est que lorsque toutes ces étapes auront été franchies que l’on étudiera les outils mobilisables, sans oublier de se fixer des indicateurs de mesure. Pour atteindre un niveau d’efficience satisfaisant des opérations de communication, trois prérequis doivent être respectés. L’expérience montre que, s’ils peuvent apparaître comme une évidence, ils sont peu souvent atteints.
« Ne pas faire un pas
sans réfléchir
au dernier. »
Carl von Clausewitz
Le premier prérequis est de donner les moyens au chef de la cellule communication de remplir sa mission. Cela implique de mobiliser des moyens en ressources humaines suffisants pour conduire les opérations indispensables et aussi pour tenir dans la durée si la crise perdure. En effet, concevoir une stratégie communicationnelle, gérer la pression médiatique et assurer une veille des réseaux sociaux nécessitent du personnel en nombre suffisant.
Inutile d’ajouter que ce personnel doit être formé et entraîné à la communication de crise. Il s’agit aussi de donner les moyens matériels adaptés à la mission : moyens informatiques, liaisons téléphoniques. Un placard à balais n’est pas un lieu propice pour concevoir une stratégie communicationnelle.
Le deuxième prérequis est d’établir, dès le début de la crise, une relation étroite entre le directeur des opérations et son chef de la cellule communication. Le communicant a besoin de connaître en profondeur tous les aspects de la situation. Il est aussi indispensable que le chef de la cellule soit informé en permanence des directives données par le directeur des opérations et de ses effets sur le terrain.
Enfin, le dernier prérequis est celui de l’anticipation. La coordination entre la conduite opérationnelle et celle de la communication ne s’improvise pas au déclenchement de la crise. Il faut s’y préparer. Les équipes de communication ne peuvent pas découvrir leur mission au lancement de la crise. Pour cela, des procédures doivent être établies en période propice. Ces procédures seront éprouvées lors d’exercices de gestion de crise.
La gestion d'une crise ne se résume pas à une série d'actions opérationnelles. Elle implique une communication stratégique, proactive et intégrée. Loin d'être un simple « outil » la communication joue un rôle central dans la gestion et la résolution efficaces des crises.
En adoptant une vision à long terme, en anticipant les besoins et en établissant des canaux de communication solides, la cellule de communication de crise sera à même de proposer un appui direct des opérations de gestion de crise.
Les crises sont, par nature, imprévisibles et souvent chaotiques, mais avec une communication bien planifiée et proactive, les décideurs pourront naviguer dans ces moments difficiles avec plus de liberté d’action. Il est donc indispensable de se former et de s’entrainer en période calme.
Article rédigé par Olivier Destefanis
Olivier Destefanis est un expert en communication de crise . Il conseille des institutions et des entreprises au profit d'ODS Communication et Crisotech. Il est aussi intervenant pour le séminaire communication de crise de l’Iscom Paris. Pour en savoir plus : https://www.linkedin.com/in/olivier-destefanis-01565b61/
COMPLÉMENT : FONCTIONS INDISPENSABLES DANS UNE CELLULE DE CRISE
Chef de cellule
Il a pour responsabilité de proposer une stratégie communicationnelle et d’en conduire les opérations. Il est en permanence en contact avec le centre des opérations pour avoir une vision précise de la situation et des directives données par le directeur des opérations.
Veille média
La veille média doit supporter l’ensemble des canaux de diffusion de l’information. Cette veille doit conduire à informer le centre opérationnel sur les évolutions des perceptions des parties prenantes au regard de la situation et sur la perception des mesures prises pour gérer la crise.
Responsable de l’animation des réseaux sociaux
Sa mission sera d’assurer la gestion des réseaux sociaux. A contrario de ce qui se fait en temps normal, la production et la veille sont permanentes. Les community managers (gestionnaires de communauté) peuvent utilement alimenter la veille média.
Gestion des relations de presse
Cette fonction va gérer l’alimentation en information des organes de presse classiques. Si la crise est complexe et à forte visibilité publique, la pression médiatique de la presse va être très forte.
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